lundi 27 décembre 2010

Entretien avec Martine PAGES






1°) Lauréate du prix de la Nouvelle organisée par PPDA en 2007, tu as publié une nouvelle (concours Volpilière 2008) et deux livres depuis (Céanothes et Potentilles éditions Volpilière et Mon guide de la défume aux éditions Guy Trédaniel).

Quelle est ton aventure avec l’écriture et quel rapport as-tu avec elle ?

L’écriture s’est imposée dès l’enfance. J’obtenais de bonnes notes. C’était la matière « français » qui me faisait « passer » de classe en classe.
J’entretiens un rapport sensuel avec elle. Il est aussi obsessionnel : si je commence un ouvrage, il m’est impossible de ne pas m’y atteler tous les jours. Des soucis de santé récents m’ont fait perdre du temps, je suis en train d’essayer de le rattraper. Mais des idées se sont envolées dans les névralgies. Pour le coup, c’est une véritable douleur. Deux ou trois chapitres, et la plaie sera pansée ! Je passe un temps incroyable à la correction. Le manuscrit se doit d’être aussi bon que beau. De la même façon qu’une petite main vérifie que l’envers de son napperon est aussi réussi que l’endroit, je suis très sévère avec moi-même et ne m’accorde aucune excuse.


2°) « Tous les romans viennent du cœur » disait François Mauriac. Je sens derrière chaque mot que tu écris une profonde sensibilité que cela soit dans ton roman ou dans le guide de la défume. Que penses tu de cette citation ? Est ce qu’elle te parle ?


Oui, radicalement. J’ai conscience que mon cerveau m’oriente vers de jolis mots et surveille les règles d’une bonne syntaxe. Pour autant, il s’agit bien d’émotions, de partage, de générosité et d’abandon. Je sais mon cœur coutumier du fait. Mais je suis assez scolaire. Aussi, il y a une part de raison qui me dicte de rédiger mes textes à l’attention des personnes que je veux toucher.

Oops, eh bien non, on en revient toujours au cœur, finalement…

3°) Dans mon guide de la Défume, on voit la femme passionnée que tu es et la passion rime souvent avec excès. Si tu as arrêté de fumer, tu n’en as pas perdu la passion. Quels sont tes nouvelles drogues/excès ?

Ok. Je suis un régime drastique, ce qui proscrit les ruées sur les frites. Je bois une douzaine de thés verts par jour, qui me donne l’illusion de la chaleur que la cigarette m’offrait, quand sa fumée pénétrait ma gorge. C’est un bon leurre. Et un leurre bio ! J’ai un peu jeté mon dévolu sur un très bon Anjou. C’est assez récurrent, mais pas alarmant. Deux verres le soir m’apaisent et je mets au défi quiconque de m’observer me rouler par terre et d’en faire le récit.

4°) Quels sont les auteurs classiques et/ou contemporains que tu apprécies ?

Je vénère littéralement Claire Castillon. Helena Noguerra m’a également touchée ; ses deux romans sont de véritables prouesses. J’attends le troisième avec impatience. Ces deux auteures sont capables d’une « impudeur de bon goût ». Elles sont très littéraires et leurs mots font transpirer une lucidité rare. Marie Billetdoux aura été mon premier coup de foudre. C’est bien elle qui m’a appris, à la lecture de « Prends garde à la douceur des choses » à décrire les émois vifs et confondants, qui ponctuent chacun de mes livres.

5°) Dans Céanothes et Potentilles, Blanche, personnage principal, se retrouve seule. Est- ce que l’écrivain Martine Pagès se sent seule ou est-elle bien entourée dans le milieu littéraire ?

J’ai la prétention d’être liée à deux maisons d’éditions. Elisabeth Mozzanini m’a donné par deux fois ma chance et sait procéder au mieux avec ses auteurs (Volpilière). Les éditions Guy Tredaniel ont cru en moi pour « Le guide de la défume ». Deux romans la même année, c’est une belle façon de faire la nique aux fortunes qu’on a tous dépensées aux PTT. Oui, je me sens affreusement seule, même si ma famille est on ne peut plus présente. Lorsque l’on n’a ni mari ni enfant, on entend souvent « Tes livres, tu en as accouché ». C’est faux. Rien ne remplace des coups de pieds dans le ventre ni la délivrance. Je n’ai pas eu la joie de traduire un test de grossesse et aucun homme n’a coupé le cordon pour me promettre la protection. Je ne veux plus entendre ce genre d’aberrations venant de…parents.

6°) Parmi les nombreux passages de qualité de Céanothes et Potentilles, un a retenu mon attention « Blanche veut le Simple et le Simple est un panneau d’interdiction, un passage piéton au petit bonhomme programmé pour être toujours rouge, si bien que si l’on est à pied, on peut attendre des années avant de traverser la chaussée. On lui dirait bien de prendre des chemins de traverse, à Blanche ».
Est ce que Martine PAGES est en train d’attendre que le petit bonhomme passe au vert, est-elle en voiture sur une autoroute ou bien s’apprête-t-elle à prendre des chemins de traverse ?

J’ai tenté les chemins de traverse, à pieds, par curiosité, pour faire différent. Ça ne m’a pas toujours réussi. Sur les conseils de personnes qui se prétendaient avisées, j’ai finalement roulé en auto sur de grands axes. Or, sur ces autoroutes, les accidents sont effrayants, voire mortels. Ma voiture stationne en ce moment même dans mon garage et je l’ai vidée de son essence. Je tente de trouver un chemin suffisamment balisé, mais sans arrêts imposés. Avec bonhomme bleu. Oui, je sais…

7°) Je pense à Mon guide de la Défume en cette fin d’année. Quels sont tes vœux pour 2011?

Un vœu de princesse. Trouver l’amour. Ce sera un moteur neuf. J’irai alors faire le plein et m’essayerai à tous les trajets que proposent les cartes routières. Sans crainte de panne sèche, ni de chaos. Enfin.

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1 commentaire:

Guillaume a dit…

Très belle interview ; merci à toi Clément de nous la dévoiler sur ton blog admirablement bien réorganisé.
Je souhaite réagir en tant que lecteur du roman de Martine PAGES, Céanothes et Potentilles. Il s’agit en effet de ma dernière « découverte littéraire » du mois d’Août 2010 qui m’a été conseillée, comme toujours avec une grande attention, par Clément.
Quelle belle découverte ce fut! L’histoire de Blanche, l’héroïne du roman, nous interpelle, nous passionne même et nous l’accompagnons, au fil des pages, dans le quotidien de sa vie. Quotidien où parfois le lecteur peut s’identifier face à des situations personnelles déjà vécues.
J’ai beaucoup apprécié les dernières lignes du roman où l’auteur nous délivre avec passion un message fort sur la nécessité de la connaissance de l’autre. Beaucoup de suspens pour ce très beau récit qui atteint son apothéose lors de son dénouement.
Je vous invite à lire Céanothes et Potentilles sans plus attendre…