mardi 21 septembre 2010

Entretien avec Marie BARRILLON à l'occasion de la sortie de son recueil de poésie les rimes de l'amour

Marie BARRILLON est chroniqueuse pour 1001 livres et auteure de trois romans déjà publiés aux éditions Le manuscrit (La vie suspendue, Leçons de vie, Emilie entre fabulations et vérités). Femme généreuse avec un talent littéraire certain, elle a accepté de se prêter au jeu des questions réponses à l’occasion de la sortie de son premier recueil de poésies, Les rimes de l’amour.






1.Dès le titre, l’amour est présent. Dans notre société contemporaine où d’autres valeurs semblent prendre le dessus, comment définis-tu l’amour ?


L’amour est à mon sens quelque chose d’indéfinissable. Chacun en a sa propre définition, sa perception personnelle. J’ai appris, avec les années, qu’en amour rien n’est vraiment jamais acquis. Il peut être tellement éphémère parfois, et même souvent.




L’amour est cependant vital dans la vie de chacun. Lorsque l’on aime et que l’on se sent aimé en retour, on se sent forcément plus fort, plus solide. Les situations, même les plus difficiles, paraissent plus simples, plus abordables, plus gérables. On n’est plus seul face à l’adversité de la vie qui ne nous fait pas toujours que des cadeaux.




L’amour est également un moteur qui nous permet d’avancer à grandes enjambées malgré les embûches, alors que sans lui, nous ne ferions que des petits pas.







2.Le thème du temps est omniprésent dans ce recueil. Y a-t-il une journée type Marie BARRILLON avec des rituels pour écrire ? As-tu une technique de gestion du temps et que places-tu prioritaire aujourd’hui ?


Généralement non, il n’y a pas de journée type Marie BARRILLON. Cependant, mes journées commencent souvent avec la lecture pendant environ une petite heure lorsque je prends mon café. Donc, dès le réveil, je suis dans le bain. Ensuite, les choses se déroulent suivant l’envie, l’inspiration, l’humeur aussi ou encore l’état d’esprit. Puis, très souvent, je m’accorde également trente à soixante minutes de lecture avant de me coucher. Mais, dans tous les cas, aucune journée ne ressemble à la précédente.




Je pense que c’est cela aussi qui permet à la passion de perdurer, en laissant le champ libre à l’inspiration pour s’exprimer à son gré. Parce que s’il y a bien une chose que l’on ne peut pas forcer, c’est bien l’inspiration. C’est d’ailleurs sûrement pour cela que je n’ai jamais ressenti l’angoisse de la page blanche.

Qui plus est, j’ai toujours plusieurs projets en cours, ce qui permet la diversité, ainsi j’avance toujours dans l’écriture et l’inspiration est toujours présente.

Donc, rien n’est vraiment prioritaire, sinon l’écriture en général.







3.Les rimes de l’amour est ton premier recueil de poésies. Comment as-tu commencé à écrire de la poésie ?


Comment j’ai commencé à écrire des poèmes, je ne saurais le dire. En fait, j’ai commencé à écrire à l’âge de quinze ans et d’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours écris des poèmes. Je pense que tous les auteurs connus ou inconnus se sont essayés à la poésie à un moment ou un autre. J’aime les phrases bien faites, les rimes qui s’accordent. Je trouve cela tellement joli et agréable à lire. Ca donne envie de poursuivre la lecture et de tourner les pages encore et encore. Et j’ajouterais même que parfois, lors de la lecture de poésies, cela apporte, ou une inspiration inattendue ou une envie soudaine de rédiger quelques rimes.




4.As-tu des maîtres en matière de poésie ?


Je n’ai pas vraiment de maître que ce soit en matière de poésie ou en littérature en général. Je n’ai pas de rejet non plus concernant les auteurs. Il m’est arrivé de ne pas aimer un ouvrage d’un auteur mais de me pencher tout de même sur les suivants car si l’un me déplait, les autres peuvent tout à fait me satisfaire. Rien n’est vraiment immuable.




Je me souviens que lorsque ma fille aînée était adolescente, elle m’avait offert un livre de Verlaine et un autre d’Apollinaire avec son argent de poche, je les ai toujours conservé pourtant je ne les ai pas relus depuis toutes ses années. En définitive, non, je n’ai pas d’auteur vraiment fétiche.




5.La première de couverture est magnifique et je sais qu’elle représente beaucoup pour toi. Pourquoi ce choix pour ce recueil de poésies ?


Par cette première de couverture, j’ai souhaité faire un hommage à ma grand-mère maternelle, avec l’accord de la personne qui me semblait la mieux placée pour cela, ma mère. Cette photo qui représente ma grand-mère date de 1930. C’est la personne qui m’a le plus marquée et qui de ce fait était la plus importante dans ma vie. A mon sens et dans tous les souvenirs qui m’habitent continuellement, elle avait un sens inné de l’amour.




D’ailleurs, elle disait que je portais le plus beau prénom du monde, et cela n’était pas en rapport à la Vierge Marie, bien qu’elle était croyante mais simplement disait-elle, Marie n’est autre que l’anagramme du verbe aimer. Je sais que je le dis souvent mais je suis certainement assez fière de ce souvenir, probablement parce que je n’aurais peut-être jamais fait la corrélation entre ces deux faits de moi-même. Et même si elle n’est plus là depuis quelques années déjà, je la porte encore dans mon cœur aussi fraîchement et rien au monde ne pourra changer cela. Elle m’a appris tant de choses.




Pour moi, cet hommage était non seulement aussi important qu’évident mais également indispensable. D’ailleurs, chaque recueil de poésies que je rédigerais à l’avenir portera cette marque, cet hommage. Je lui dois beaucoup, en l’occurrence psychologiquement et moralement, même depuis son absence. Nous étions, si je peux dire, fusionnelles. Je ne cesserais jamais de l’aimer avec autant de force comme si elle était encore là. Je souhaite à tout le monde d’avoir une personne aussi importante au moins une fois dans sa vie.




6.Les rimes de l’amour, ton dernier livre est plus qu’un recueil de poèmes. On a l’impression de traverser ta vie au cours de tes poèmes mais quelle est ta vision de l’écriture ?


A son commencement, l’écriture était pour moi une sorte d’exutoire. Un baume aux maux de la vie, de l’enfance à l’adolescence puis à la vie d’adulte. Elle me permettait, outre la lecture, de m’évader. Comme je l’ai dit, j’avais quinze ans à l’époque de mes premiers pas dans l’écriture et mes jours étaient loin d’être joyeux, comme beaucoup d’enfants. J’ai trouvé en l’écriture, le moyen de m’exiler dans un ailleurs inaccessible à autrui, une forme de protection peut-être. Cette passion m’a suivie, fidèle dans les bons moments mais surtout, et c’est là qu’elle jouait son rôle de sauveteur, dans les mauvais.

Il s’est passé beaucoup de temps avant que le désir d’être éditée naisse à son tour, à peu près une vingtaine d’années. Il a fallut un gros coup dur pour que ce désir apparaisse, comme un besoin inexplicable, avec "La vie suspendue". Ce livre est assez court mais d’une immense souffrance, je n’avais nulle envie d’en rajouter, et je dis toujours que je l’ai écrit dans l’urgence. C’est grâce à lui que je n’ai pas coulé à ce moment.




J’ai souhaité le publier comme pour témoigner de cette douleur et que même si l’amour n’est pas toujours plus fort que la maladie, il faut se battre avec lui (l’amour) contre elle (la maladie). Vingt ans et un gros coup de bâton de la vie pour arriver au désir d’être publiée, cela paraît long quand on le dit comme ça, mais en réalité le temps passe tellement vite… Peut-être que l’omniprésence du temps vient de là, allons savoir !




Toujours est-il que depuis mon adolescence je n’ai jamais cessé d’écrire, comme un besoin indispensable et viscéral, éditée ou pas d’ailleurs. Je pense que cela fait partie intégrante de mon équilibre au même titre que boire ou manger, c’est aussi vital. J’aime inventer des histoires, créer des vies et faire vibrer les lecteurs. Mes histoires, je les vis complètement comme un film dans ma tête. Peut-être est-ce un peu vivre dans deux mondes parallèles, indispensables l’un à l’autre : le réel et l’imaginaire.




7.Tu es une pile électrique du net, toujours en train de créer des projets autour de la littérature. Peux-tu nous parler un peu plus (groupe facebook, forum, page fan, site internet,…) des projets actuels et nous évoquer tes projets futurs autour de la littérature ?


Internet, c’est un peu aussi un monde parallèle à bien y regarder. Virtuel certes mais pas moins humain pour autant, et j’irais même à dire plus humain que le monde réel. J’aime l’échange et le partage. Derrière chaque commentaire, il y a toujours un cœur qui bât, et ce qui m’attriste c’est que ces échanges de cœur ne se retrouvent pratiquement que sur le net, jamais chez le boulanger ou au supermarché, par exemple, ou alors si rarement.

A travers les forums, groupes ou même ma page fan sur Facebook, je croise des personnes que je n’aurais jamais imaginé croiser, ne serait-ce qu’à cause de la distance. Ces différents groupes ou forums rapprochent les gens et font tomber la barrière des dites distances, ils donnent plus de facilité d’échanges entre les êtres sur des sujets communs, de là naissent des amitiés, de vraies amitiés que les distances n’incommodent pas. Et ces rencontres virtuelles aboutissent parfois à des rencontres réelles. Personnellement, je n’ai jamais été déçue. J’ai rencontré des gens d’exception, véritablement.




En ce qui concerne les projets par rapport aux forums et groupes, je suis pour l’instant un peu moins présente car, comme pour beaucoup de gens, le temps me manque. Ma devise est d’ailleurs, "Mes jours manquent d’heures, pour en faire plus". Mais, bien évidemment cela ne veut pas dire que je les abandonne, bien au contraire. Et pour ma page fan, je pense avoir trouvé là une option intéressante pour les lecteurs, car sur cette page je n’y parle que de mes projets, mes lectures, mes chroniques, mes publications…enfin, tout ce que les lecteurs veulent savoir sur mes activités littéraires. Ils sont informés en temps réel et par la personne la mieux placée pour transmettre les informations et en parler : moi. Contrairement à ce que certains ont pu imaginer. J’ai reçu, il y a peu, un mail déplorant le fait qu’une personne tenait ma page à ma place, alors que les lecteurs se rassurent, il n’en est absolument rien. Je ne laisserais à personne ce soin de tenir ma page fan, j’aime les échanges avec mes lecteurs.




8.Un prochain livre va bientôt paraître, Camille, regarde devant toi ! Peux-tu nous en parler ?


"Camille, regarde devant toi !" aurait dû être publié durant l’été mais les choses ne se déroulent pas toujours comme on le souhaite, c’est comme ça. Pourtant, l’éditeur en question se disait très emballé par ce roman… Bien évidemment, cela m’a fait perdre un temps précieux. Le monde de l’édition est parfois tellement incompréhensible, mais sans autre choix nous devons bien faire avec à défaut de faire sans. Donc, "Camille…" verra le jour début décembre, sauf énième déception. Ça m’a permis de le revoir et d’y apporter quelques corrections durant la période estivale. Le sujet reste donc à découvrir pour les lecteurs. Mais, ce que je peux leur dire c’est que comme toujours, il commence mal pour se terminer très bien, car c’est du rêve, de l’émotion et du plaisir que je souhaite leur faire vivre au travers de mes pages, alors ça ne peut que finir bien.




9.As-tu d’autres projets d’écriture en cours ?


D’autres projets, bien évidemment je n’en manque jamais et ils sont très nombreux. Vous pourrez me lire encore pas mal de temps (sourire). En ce moment, je suis sur l’écriture d’un prochain roman qui s’intitulera "La vie est parfois une surprise". Encore quelques mois de gestation comme on dit, et il sera prêt. En parallèle, je suis sur la réalisation d’un autre recueil de poésies qui devrait sortir début 2011. Celui-ci sera moins axé sur l’amour comme le premier, mais sans pour autant passer à côté. J’y touche plusieurs sujets de société du bout des doigts, mais en tout cas des sujets sensibles. Il est très différent du précédente de bout en bout, y compris dans sa présentation. Peut-être même est-il meilleur à mon goût, mais ce n’est que mon avis.




Trois autres projets de roman sont en attente dont les grandes lignes sont déjà rédigées. Et puis, il y a les ateliers d’écriture pour les personnes âgées au sein des maisons de retraite. Là aussi, le but final serait la publication de recueils de leurs écrits avec reversement des droits d’auteur aux maisons de retraite concernées ou à des associations d’aides aux personnes âgées. Mais, nous n’y sommes pas encore et tout reste à définir. Nous verrons cela par la suite. Je pense très sincèrement que nos personnes âgées ont tant de choses à raconter, à nous faire partager, mais également à nous apprendre. Elles ont aussi traversées tant d’épreuves pas toujours faciles ou évidentes mais leur passé est à découvrir avec leur propre mots et pourquoi pas même pourrions nous en tirer des leçons et en tout cas beaucoup de plaisir, j’en suis intimement persuadée.




Lorsque je discute avec ces personnes tellement adorables, j’en retiens toujours une même et profonde évidence, c’est la tristesse qu’elles ont en regardant ce monde qu’elles ne reconnaissent plus, parce qu’il est tellement différent de celui dans lequel elles ont évolué. Toutes ces valeurs perdues, ça leur fait froid dans le dos. Alors, elles regardent ce monde et se résignent à tenter de le comprendre, mais n’y parviennent pas. Les personnes âgées, c’est ma troisième passion (sourire).




10.Quel regard portes-tu sur le monde de l’édition et celui de la littérature contemporaine ?


Ça, c’est la question brûlante. Il y en toujours une dans le jeu des questions/Réponses, les interviews… Là, je sens que je ne vais pas me faire que des amis.

Je trouve que le monde de l’édition dit "traditionnel" est devenu très frileux. Il n’y a plus de prise de risque ou alors très minime. De nos jours, si nous n’avons pas un nom déjà connu ou un sujet hyper brûlant, ce milieu reste très très fermé. On publie trop sur des valeurs que l’on sait acquises dès le départ, ça va d’un nom qui fera vendre, certes mais pas seulement. Il y a également les effets de copinage, etc. Les exemples ne manquent pas, il suffit de regarder autour de soi. Que l’ouvrage soit bon ou non, n’a finalement plus grande importance. C’est dommage car il existe beaucoup d’auteurs, et de très bons qui n’ont d’autres choix que de se tourner vers la petite édition ou encore l’édition à la demande. Et heureusement que celles-ci sont présentes.




Par exemple, oui je sais que je vais faire grincer quelques dents, mais j’assume, prenons Edilivre, pour ne citer que celle-ci, c’est à mon sens un très bon parallèle ou un palliatif, c’est selon, à l’édition traditionnelle frileuse. Cette maison fait pas mal d’efforts et monte de plus en plus dans "l’audimat" de l’ensemble des maisons d’éditions, traditionnelles ou non. Ce n’est que mérite car cela permet à beaucoup d’auteurs de sortir la tête du sable, même s’ils bataillent ferme pour se faire connaître. Et même si cela reste une édition à la demande, ce qui évite les stocks, ce n’est pas une édition à compte d’auteur non plus.




Donc, c’est tout à fait bénéfique pour les auteurs qui souhaitent être publiés. De plus, c’est une maison assez réactive tant sur l’évaluation des projets qui leur sont soumis que par la publication mais également en matière de livraison des ouvrages où là encore la rapidité est de mise. Ce ne sont que quelques exemples, mais il y en a d’autres, bien sûr.




En dehors de ces maisons d’éditions à la demande et les maisons traditionnelles, il y a la petite édition. C’est une bonne chose, bien qu’il faille ici être quand même assez vigilant car certaines de ces maisons font tout de même du compte d’auteur.

Donc, en définitive, je dirais que le milieu de l’édition est assez complexe pour quelqu’un qui y fait ses premiers pas. C’est un peu une jungle, pas toujours très civilisée.



Un entretien à découvrir également en suivant ce lien:
http://www.1001-livres.fr/membre/profil/clement%20chatain/actualite-69

AddInto

Salwa, une voix talentueuse et des textes de qualité!

Un petit article rédigé à l'occasion de la sortie du prochain single de Salwa:

http://www.facebook.com/home.php?#!/note.php?note_id=115668701824095&id=152759844744346&ref=mf

samedi 11 septembre 2010

A la folle jeunesse Ann SCOTT

« Un glaçon avait giclé du verre. Il avait atterri sur le haut d’une enceinte à côté de moi, une enceinte recouverte de confettis d’argent qui se reflétaient dans ses arrêtes, et malgré la moiteur de l’endroit bondé, il trônait la intact, cristallin. Pas même l’amorce d’une infime petite flaque. Rien qui laissait présager du début à la fin, et c’était comme çà que ma vie m’apparaissait à quelques jours de mon quinzième anniversaire. Intacte, même quand certains points de non-retour semblaient déjà avoir été franchis. Sauf que la semaine prochaine, je n’aurai pas quinze ans. Ce glaçon à maintenant fondu depuis vingt cinq ans, et avec lui ont disparu l’insolence et la fièvre pour céder la place à la peur. »


Le style ANN SCOTT : Un style !
Si j’ai choisi de commencer ma chronique par une longue citation, c’est parce que cette comparaison placée au début du livre m’a littéralement séduit. Je ne pouvais que continuer la lecture de ce livre car de nombreuses pages comportent une phrase stylée se glissant sans aucun échec quelque soit la tonalité voulue par l’auteure suivant les étapes décrites.
J’admets que parfois j’ai éprouvé quelques difficultés à suivre l’auteure. C’est peut être d’ailleurs un souhait de cette dernière que le lecteur finisse par se perdre comme elle-même s’est perdue par moment réellement dans son histoire comme elle nous l’explique.
Malgré quelques passages difficiles, je n’ai pu que continuer ma lecture car je souhaitais toujours connaitre l’effet de style suivant et je n’ai pas été déçu car ce livre recèle de nombreux effets réussis.

Une histoire
Est-ce une autobiographie qui nous est proposée ici ? On reconnait bien l’auteure de Superstars qui décrit d’ailleurs son immersion dans le milieu littéraire avec brio. Ann SCOTT revient sur cette période particulière avec les interviews et le rythme suivi par cette dernière lors de la sortie de ce succès.
« Si je n’avais pas trébuché sur un arrosoir, dans la cour, je n’aurais peut être jamais parlé à ma voisine Stella. Je ne lui aurais pas offert mon premier roman et elle n’aurait pas eu cette phrase déterminante, le lendemain : « je n’ai aucune complaisance pour les gens qui ont du talent et qui n’en font rien. »
Ses rapports avec les autres que cela soit avec sa famille ou ses amies sont également décrits dans ce livre. Nous découvrons des phrases poignantes fortes en émotions :
« Lorsqu’on a un père orphelin et une mère qui a perdu la sienne à la naissance, j’imagine qu’on ne peut pas leur en vouloir de ne pas avoir su donner ce qu’ils n’ont pas reçu. »

En réalité, dans ce livre, une femme de quarante ans porte un regard sur sa vie en regardant derrière elle pour tenter de trouver des réponses.
« Je suis restée à regarder le portable dans ma main. Stella quittait Paris, ma belle mère aimait Joan JETT, mon père portait des chemises de nui, mon frère avait déjà dix huit ans et Marie adoptait un enfant »

Apocalypse bébé de Virginie DESPENTES

« Je prendrais les frais en charge. Nous ferons un avenant au contrat original. J’offre une prime de cinq mille euros si vous la ramenez en quinze jours. En contrepartie, si vous n’obtenez aucun résultat, je vous ferai vivre l’enfer sur terre. Nous avons des relations et j’imagine qu’une agence comme la vôtre n’a aucune envie de subir toute une série de contrôles…désagréables. Sans parler de la mauvaise publicité. » Nous sommes au début du livre et déjà quelques thèmes apparaissent : argent, relation, enquête mais ne nous arrêtons pas en si bon chemin…

Une histoire simple
Lucie détective spécialisée dans la surveillance de mineurs fait ce boulot depuis une dizaine d’années sans réellement s’y intéresser. Elle gagne sa vie correctement mais sans augmentation de salaire et la crise de la trentaine aidant, elle réfléchit souvent à sa condition humaine. Au cours d’une filature, elle va perdre la trace de Valentine. Valentine, adolescente de son époque, avec un père écrivain, une grand-mère envahissante et une belle mère qu’elle n’apprécie pas beaucoup, va entraîner Lucie dans une sorte de nouvelle vie. En effet, peu habituée à traiter des affaires de fugue et elle-même détective par défaut et sans grand intéressement à son métier, elle va faire appel à la Hyène, femme d’expérience et de réseau qui va lui faire découvrir un autre visage de la société. Elles vont de Paris à Barcelone partir à la recherche de cette adolescente.
« Depuis que je travaille ici, j’enrage d’être cantonnée à la surveillance des adolescents. Aucun gamin ne peut fumer un joint tranquille sans que je lui colle personnellement au cul. »


Une société en sursis
Virginie Despentes nous décrit une société en sursis. Derrière chaque mot, chaque passage, nous ne ressentons qu’une profonde tristesse que nous percevons dans le regard d’une femme sans concession. Les lesbiennes, les catholiques, les femmes avides d’argent, les hommes de pouvoir ou qui pensent en avoir, le milieu de la littérature et celui des nouvelles technologies et des réseaux sociaux, les catholiques, les musulmans, les adolescents, l’extrême gauche, le milieu médical…chacun en prendra pour son compte. Nous sentons une grande tristesse de notre société contemporaine et la fin ne sera qu’une illustration du titre de ce livre.

« Il avait honte rétrospectivement, de ne pas avoir anticipé ce que deviendrait le livre, une industrie un peu plus bête qu’une autre. Vieille rombière outragée, minaudant dans des robes en lambeaux. Ardisson Canal+Inrocks,. Des ennemis dont on n’avait pas saisi le pouvoir de nuisance. Ni de droite, ni de gauche. Ni classiques, ni modernes. Des gens de télé. Bien de leur époque. Des pitcheurs, avides de chair fraîche, gourmands d’audience»


Un style et un point de vue en suspens
Le style Virginie Despentes ? Je n’ai pas lu son célèbre Baise moi qui avait fait sensation il y a quelques années et je commence ainsi mon premier Despentes avec ce livre. Un style auquel je m’attendais au fond. Aucune surprise et je pense que les habitués de l’auteure ne seront pas très étonnés également. Le style de l’ouvrage correspond à celui de l’auteure que l’on voit sur les plateaux télévisés. Même si cela serait bien réducteur de limiter l’auteure à son livre et vice versa…

Les mots sont parfois crus et des phrases assassines parcourent le livre. Les descriptions nous permettent de bien rentrer dans la peau des personnages mais parfois nous nous retrouvons dans de nombreuses longueurs où le lecteur peu attentif risque de se perdre. Pourtant, c’est bien dans ses nombreuses descriptions que le style DESPENTES éclate avec un attachement particulier à s’attarder sur la vision horrible de la société dans laquelle nous vivons.
Au sujet des français en vacances en Russie, Roumanie ou Thaïlande « Les français ont besoin de voir des pauvres qui ne les insultent pas. Ils savent qu’ils montent dans un bus blindé pour s’extasier sur les conditions de vie des pauvres dans leurs banlieues, ils vont se faire brûler le bus. Cà les met dans la détresse : toute cette pauvreté sur laquelle ils pourraient s’attendrir, lâcher une petite pièce et donner leurs vieilles fringues. Mais ces pauvres là sont méchants. Ca complique les choses, pour la charité chrétienne. »

Je ne peux pas terminer cette chronique sur un site regroupant des passionnés de littérature sans cette citation… « Fréquenter les artistes, elle s’en passe volontiers. Les sportifs, les politiques, çà peut l’impressionner. Mais artiste…toujours une imposture. En tête de sa liste du pire, sans hésitation, elle placerait les écrivains. Elle connait, elle a donné. Ce qui est offert d’une main aimable est reprise au centuple de l’autre, la main rapace, fouilleuse et sans scrupules. La main qui écrit, celle qui trahit, épingle et crucifie. »

Mon guide de la défume comment j'ai dit Adieu au tabac de Martine PAGES

« Parce que je dis que les films sont moins beaux depuis que je ne fume plus, que le ciel bleu l’est moins, que mon mec n’a plus la voix aussi tendre, que les musiques que j’écoute ont l’air d’être moins mélodieuses, bref que la terre entière n’a plus le doux parfum du bonheur depuis que les oiseaux ne chantent plus à ma fenêtre et que mes fleurs sont éteintes, elles aussi. Moi, je pensais que c’était une jolie formule poétique pour dire combien le retour du tabac dans ma vie serait une richesse. »

Je ne suis pas fumeur. Certes, Je suis drogué à plusieurs choses mais pas à la cigarette. Je pense que mes addictions m’ont permis de comprendre le long combat de Martine Pagès dans sa volonté d’arrêter de fumer. Au-delà d’un livre témoignage, une femme nous dévoile sa vie à travers différentes facettes. Cette chronique se structure autour de plusieurs visions reprises par l’auteure elle-même à la fin de son livre.

« …Je suis défumeuse poète… »
Martine Pages est une poétesse de talent sachant jouer avec les mots en donnant toute une musicalité à cet exercice difficile dans lequel elle se livre entièrement. Nous passons bien par les cinq sens et des frissons parcourent notre corps en lisant certains passages tant elle nous fait rentrer dans son intimité. Que cela soit avec les médecins, les inquiétudes liées aux maladies ou à son petit copain, il ressort une grande sensibilité se retrouvant derrière chaque mot choisi avec talent.

« Christophe ne me manque même pas, toute mon attention et tous mes sens sont focalisés sur le vide immense qu’un morceau de papier fourré, à peine plus long qu’un doigt, laisse dans ma vie, plus plate que jamais, une morne plaine, sans contours ni reliefs, sans pleins ni déliés, et j’en arrive à prêter au tabac la responsabilité improbable de vision en 3D…. »

« …Je suis une défumeuse juvénile… »
Juvénile car l’écriture est dotée d’une grande modernité. Nous traversons notre époque avec l’ensemble des outils offerts aux fumeurs pour tenter d’arrêter la cigarette. Elle nous analyse également l’évolution législative et le nouveau phénomène invitant à la concentration des fumeurs dans un même lieu.Concernant les locaux aménagés pour les fumeurs, « je suis assez heureuse de ne pas faire partie des troupeaux entassés dans ces maisons de poupée, comme elles n’ont, entre nous, rien de conforme aux dimensions humaines. Lewis Carroll y aurait trouvé une grande inspiration, y aurait installé Alice, un peu gênée aux entournures, étouffant, gémissant dans sa quête d’air pur, prête à expirer, découragée par l’absence de fenêtres, déterminée par dépit à défoncer le toit… »

« …Je suis une défumeuse comique… »

L’auteure dévoile une plume ironique et souvent grinçante qui ne peut laisser indifférent. Les descriptions et les métaphores sont dotées d’un humour ravageur qui ferait presque oublier le dur combat pour arrêter une addiction. Faire de l’humour sur un tel sujet était un pari risqué mais il est *en attendant réussi.

« Je reçois le relevé de tous mes remboursements médicaux. Impressionnante, la fidélité dont je fais preuve…C’est tout juste si, au bas de la page, on ne me remercie pas de prêter si fréquemment la partie supérieure de mon corps à la science… »

« …Je suis une défumeuse championne… »

Se confier et ouvrir la porte de son studio sans tomber dans le stéréotype et la vulgarité est un exercice bien périlleux. Mais Martine Pagès est bien une championne de l’écriture et elle signe un livre avec brio regroupant l’ensemble des ingrédients nécessaires à la réalisation d’un excellent ouvrage. Il ne faudrait pas en plus oublier l’essentiel : il semble que l’auteure au bout de 36 mois n’a pas repris une cigarette.

« Je mets en parallèle la facilité déconcertante avec laquelle certains hommes peuvent se débarrasser d’une fille sans crainte d’en manquer, et ma difficulté de tirer un trait définitif sur les cigarettes. Je suis là, prostrée par le contraste, la bave en écharpe…Malgré tout, toujours no-fumeuse, par je ne sais quel miracle… »


« …Je suis une défumeuse de couverture de magazine… »

Nous retrouvons bien la chroniqueuse attachée à la beauté à travers de nombreuses petites allusions. Elle nous livre ici un portrait tendre d’une femme de son temps, consciente de l’exigence médiatique sans se laisser submerger par elle.

Lire ce livre ne tue pas, je le recommande pour un moment de pur plaisir !

Les rimes de l'amour de MARIE BARRILLON à lire de toute urgence!!

Aujourd’hui, dans un monde où la rapidité semble de mise dans l’ensemble des domaines tant privés que professionnels, ou l’argent roi omniprésent dans notre société hypercapitaliste guide vers des chemins sinueux, où sommes de pseudos poètes tentent d’aligner trois vers avec difficulté s’empressant de tenter de vendre un ou deux livres avec pour certains la certitude d’avoir inventé un concept novateur et qui nous le présentent comme un pot de yaourt, je suis heureux de voir que la poésie existe encore.

Si vous aimez la poésie, si vous êtes nostalgique de Ronsard, de Baudelaire (début de vie car à la fin on sait bien que dans mon cœur mis à nu…il a rencontré quelques difficultés), d’Apollinaire ou de Paul Eluard, ce recueil va rapidement devenir votre livre de chevet.


Au menu de ce livre : les mots pour les maux, les mots pour le temps, les mots pour l’amitié, les mots pour l’amour sont autant de thèmes abordés dans ce menu à la carte qui saura raviver la flamme des fins palais littéraires.


Ma gourmandise fait que je n’ai pu que savourer quelques vers en piochant au hasard dans le livre dans un premier temps, puis en reprenant soigneusement par la suite chaque poème dans l’ordre proposé. La suite, vous la connaissez cher lecteur puisqu’elle n’est pas finie et inavouable. Comme chaque livre de chevet, je pense que je vais continuer à picorer sans fin (ou faim…) ces quelques vers sans jamais me rassasier.


Si certains vers obéissent aux règles de la liberté, d’autres sont construits avec des rimes talentueuses. Le tout forme un ensemble de poèmes unis par la beauté des mots enivrants avec un rythme endiablé nous invitant à frissonner tout au long de la lecture.


Que dire d’autre à part citer quelques vers afin de vous dévoiler le style Marie Barrillon, poétesse de talent, auteure de qualité, chroniqueuse de passion et femme exceptionnellement généreuse.


« Tu as choisi les billets verts contre les billets du cœur
Amour, argent commencent par la même lettre
Mais n’ont jamais eu la même valeur »

Extrait du poème Luxure n’est pas amour


« J’ai senti ton parfum

Et puis la caresse de tes mains,

J’ai fermé les paupières

Pour prolonger le rêve.

Lorsque je les ai rouvertes,

Tu étais sur mon cœur. »

Extrait du poème Prière « Je vais t’apprendre en douceur

A fermer les yeux sur la peur

Faire de nos jours les meilleurs

En éparpillant toutes les saveurs »

Extrait de Pas dans une autre vie


« Son seul souhait serait de s’éteindre doucement,

Le moment venu, avec le sourire et l’apaisement,

L’ultime souffle comme un dernier baiser à l’être aimé

Les persiennes grandes ouvertes sur l’éternité étoilée. »

Extrait de Cœur

Une chronique à découvrir également en suivant ce lien:
http://www.1001-livres.fr/1614-Les%20rimes%20de%20l'amour

Voyages avec mon amant virtuel tome 1 - Le genou

« « Ah non ! Pas le genou ! Il t’a touché le genou ?! Ah non ! Je préférerais encore qu’il t’ait embrassée… » Je la rassure. Il n’a jamais fait que tester… « Attends d’avoir mon âge et d’être comme moi, flattée… ce n’est rien ! Ne t’en fais pas. Je ne suis pas une femme fatale. » »

Histoire simplifiée complexe
Une femme de 55 ans se fait draguer par un jeune millionnaire de trente ans à Londres. Elle est mariée et son mari Guy ne semble pas s’opposer à la liaison hypothétique de son épouse. Elle aime d’ailleurs jouer à le provoquer de temps en temps lorsqu’elle reçoit un texto de lui. Lui, c’est Myles, le fameux millionnaire. Le jeu de la séduction va être omniprésent tout au long du livre avec des attentes difficiles qui en disent parfois plus long que la réalité et les textos tendres ou étonnants qui traversent le livre.Le titre du livre résonne tout au long de l’histoire en réalité car ici il s’agit bien d’un voyage avec un amant virtuel. Nous traversons des villes mais aussi des époques accompagnées du doute et de la réflexion de la narratrice. Mais dans ce long fleuve d’hésitation, il y a ses amies, son mari, son neveu et même une élève de neuf ans. Chacun apporte son grain de sel à l’histoire et la large majorité la pousse dans les bras de Myles. Malgré tout, il y a Guy. Ce fameux mari quasiment chômeur une partie du livre, puis retraité, qui prépare les petits plats à la maison et repasse le linge.


Un style séduisant et humoristique
On ne se lasse jamais du style de Catherine BEAUFORT. Elle a su ingénieusement mettre son style au service de ce roman réussi avec dès le départ ses effets provoqués par les répétitions, les titres de chapitre accompagnés du degré de température ou encore les quelques définitions de terme avec la comparaison anglais/français. Tout au long de ces longues réflexions, nous retrouvons cet humour permettant de rendre la lecture de ce livre captivante et agréable.Quoi faire d’autre pour vous inviter cher lecteur à découvrir un style que de partager avec vous quelques pépites littéraires ?

Un exemple de définition et de comparaison :
« MARIAGEL’une des définitions du Petit Larousse illustré de 2003 est la suivante :« L’un des sept Sacrements de l’Église catholique. »MARRIAGE“Formal union of a man and a woman typically recognised by law.”The New Oxford Dictionary est démodé, cette fois-ci, car les homosexuels mâles et femelles peuvent se marier depuis cette année, comme l’a fait Elton John. »

Une longue phase de réflexion au début du livre dont voici un extrait…

« Tout a vraiment commencé, en fait, bien avant moi, bien avant elle, il y a déjà fort longtemps, quand les hommes étaient hommes et les femmes étaient femmes, et que même encore maintenant on ne le croit pas. Ou peut-être que si. »


A la découverte des dialogues :
« – J’aime vos cheveux ! Très classe !
– Merci !
– Êtes-vous mariée ?
– Oh oui ! Depuis trente ans ou plus !
– Pourquoi ne portez-vous pas d’alliance ?
– Mon mari et moi avions de l’eczéma sous nos alliances qui étaient larges à l’époque, alors nous avons arrêté de les porter. Le mariage représente bien autre chose de toute façon !
– Quoi par exemple…
– Une connexion émotionnelle…
– C’est ce que vous avez avec votre mari ?
– Oui. Quelquefois !
– Avez-vous eu des amants ?
– Non.
– Pourquoi pas ?
– Je ne sais pas. Je n’y ai pas réfléchi. Peut-être que je veux tout ou rien. Pas de jeux. À quoi bon ? »

Il ne vous reste plus qu’à découvrir ce petit bijou dans sa globalité.

Une chronique à découvrir sur le site 1001livres également.
http://www.1001-livres.fr/1599-Voyages%20avec%20mon%20amant%20virtuel%20tome%201%20-%20Le%20genou

Lignes de vie de SAMANTHA BAILLY

« Nous sommes tous d’immenses barrages remplis d’eau, ces sentiments qui cognent fort, toujours plus fort…jusqu’à ce que les parois se fissurent. » Une belle métaphore relevée dans ce livre de qualité.

Les échanges épistolaires et le style Samantha BAILLY
Je suis un passionné de littérature et les échanges épistolaires ont toujours été pour moi un réel moment de partage et d’émotion. Je me surprends parfois à piocher au hasard une lettre dans un livre épistolaire et à relire à partir de là toute la correspondance. La déception n’a pas été au rendez vous à la lecture de ce livre, je me suis encore laissé prendre au piège.

Je vous rassure cher lecteur, j’ai lu entièrement le livre de cette jeune plume prometteuse. Je peux même vous assurer qu’en deux soirées le livre était terminé. Je ne pouvais plus m’arrêter, le souhait de toujours connaître la lettre suivante m’envahissait. La pire erreur étant peut être dans ce style particulier l’essoufflement et la perte du lecteur mais ici ce n’est réellement pas le cas, on se laisse entrainer rapidement par ce style séduisant. Les mots sont habilement utilisés et les deux personnages se dévoilent à un bon rythme. Nous noterons d’ailleurs l’évolution des termes utilisés pour clôturer les lettres, un souci du détail réfléchi laissant place au changement de tonalité des relations. Le passage du tutoiement au vouvoiement est rondement mené en se faisant tout en douceur. Au fur et à mesure que l’on avance dans l’histoire, j’ai eu peur d’une chose : c’est que je retrouve ce fameux essoufflement à la fin. Mais le pari est réussi, il est même plus que réussi car les plus sensibles verseront une petite larme dans les dernières lettres…mais je ne vous dirai rien cher lecteur de plus…est ce qu’il s’agit de larmes de joie, d’anxiété, de peur, de trouble? Non, non et non, vous devez lire ce livre pour ressentir les frissons dans votre propre corps.

L’histoire
Tout commence le samedi 21 novembre 2009 à Caen. Gabrielle reçoit dans sa boite aux lettres une étrange lettre d’Antoine. Ce dernier l’a postée par hasard (en apparence seulement…) dans cette boite en expliquant que « nous ne nous connaissons pas mais j’ai eu l’envie irrésistible d’écrire ». Gabrielle malgré quelques réticences va petit à petit se prendre au jeu et les échanges vont s’intensifier jusqu'à devenir indispensables. La forme peut surprendre à l’heure des réseaux sociaux et des différents « chat » mais comme l’explique Antoine ;

« Ici, c’est juste plus réel, parce qu’il y a le contact du papier, le fait de poster l’enveloppe plutôt que de cliquer simplement sur « envoyer » ».

Au fur et à mesure, les protagonistes se dévoilent. Le travail pour l’un, la vie universitaire et les doutes pour l’autre mais aussi leur couple respectif. Leur vision de la société actuelle est également abordée avec réflexion et de nombreuses pensées. D’ailleurs Gabrielle n’hésitera pas à dire que « cette correspondance me donne l’illusion d’un jardin secret. »

Si le livre ne se compose que de lettres, Antoine et Gabrielle vont malgré tout se rencontrer physiquement le jeudi 4 mars 2010. Cela sera source de réflexions et d’interrogations.

« Alors, comme toi, je me demande si se rencontrer c’est une bonne idée ; quelque part, ne serait ce pas rompre cette sphère intime de confidences ou le jugement de l’autre, inconnu, n’a aucune importance. »

La relation homme femme : vers les chemins de la complexité
On s’interroge souvent sur la réelle possibilité de la relation d’amitié homme/femme. Leurs échanges semblent clairs, ils sont même précisés au milieu du livre très nettement par Antoine sur demande de Gabrielle mais au fond est ce que ce n’est pas qu’une clarté remplie d’obscurantisme ?

« Tu comprends, quelque part, nous restons des étrangers l’un pour l’autre, et aussi, il faut bien le dire, un homme et une femme ».

Le pari est trois fois réussi, dans le style, dans l’histoire et dans la traduction du rapport homme/femme. Un livre à lire sans hésitation.

Une chronique à découvrir sur le site 1001livres également:
http://www.1001-livres.fr/1564-Lignes%20de%20vie

Confessions d'un banquier pourri de Crésus

« Vous ne me connaissez pas, vous n’avez jamais entendu parler de moi. J’ai grandi dans l’ombre, au cœur du sérail de l’argent. Je suis un parasite de la haute finance, l’un des membres du directoire d’une des plus grandes banque de France. A peine surpayé, j’ai ramassé quelques millions d’euros en une quinzaine d’années. Une paille, comparé aux salaires et aux primes des traders que je dirige. »


Première question dont je me moque mais qui est importante…
Voila, dans ma petite citation introductive, j’ai repris ce qui a le plus intéressé la presse lors de la sortie de ce livre. Tous ont tenté de répondre à la question qui est Crésus. Je vous informe de suite, je ne le sais pas et je m’en moque. Ce n’est pas une chose importante au fond. Des indices se glissent tout au long du livre mais cela peut aussi bien être un véritable membre du directoire d’une grande banque française (certains étant partis avec la crise…) qu’un fin connaisseur des marchés financiers qui a souhaité s’amuser avec ce livre. Dans tous les cas, ici, nous avons un livre habilement mené avec une description qui ne doit pas être très loin d’une réalité inquiétante sur le système financier.

Un véritable thriller
Le personnage principal, Damien, occupe un poste de directeur général dans une grande banque française. Au fil de ces rencontres, il va apprendre, avec un temps d’avance, que Lehman Brothers est mort. « Certains journalistes se souviennent qu’un an auparavant, le magazine Fortune avait décerné à cet établissement prestigieux le titre de « banque d’investissement la plus admirée des Etats Unis ».

C’est une prostituée de luxe qui va lui révéler ces informations avant tout le monde et cela va lui être confirmé par un autre acteur de la finance mondiale influent. Nous sommes dans un véritable thriller dans lequel Damien va tenter de gagner beaucoup plus d’argent qu’il en gagne actuellement (selon lui) à travers un instrument financier, le SWAP. Si au départ, Damien apparaît comme le salarié modèle prêtant attention à son entreprise et aux conséquences des actes catastrophiques menés, on s’aperçoit rapidement qu’il appartient bien à ce milieu où l’on retrouve drogue, sexe, délits d’initiés et politique. Une réunion montre l’état lamentable dans laquelle se trouve la banque et plus personne ne semble maîtriser ces chiffres.

« Voila qui étaient vraiment nos polytechniciens. Des polymagiciens de pacotille, forts en maths, certes, mais sans un sou de jugeote. »

Les différents acteurs de la finance et d’une certaine forme de sa chute sont passés au crible ici, des organismes de contrôle aux traders en passant par les économistes.


Le langage des marchés revisité

Dès le début, le style de l’auteur est agréable avec quelques métaphores intéressantes. Ainsi, le « syndrome de la saucisse » pour évoquer les subprimes m’a fait sourire.

« Eh bien, quand on m’interroge, je compare les banquiers à des bouchers pas très consciencieux. En fait, nous avons fait disparaitre les crédits à hauts risques dont nous voulions nous débarrasser en les mélangeant avec des créances de bonne qualité. La fabrication de ce cervelas d’un genre nouveau s’appelle la titrisation. Ensuite, on débite les nouveaux titres en tranches, qu’on vend en engrangeant au passage de belles commissions. […] Quand les morceaux de viande avariée-en l’occurrence les subprimes-pourrissent et deviennent toxiques, çà contamine toute la saucisse, et les acheteurs tombent malades. […] Je pense que ceux qui ont trop mangé de saucisses ne s’en sortiront pas. Quant aux autres, ils considèrent désormais que tous les bouchers sont des escrocs et des empoisonneurs. »


Un petit livre sympathique qui séduira les admirateurs de la haute finance ou les passionnés de l’histoire économique.

Une chronique à découvrir également en suivant ce lien:
http://www.1001-livres.fr/1377-Confessions%20d'un%20banquier%20pourri